Ce dispositif de 64 hexagrammes et de leurs commentaires et transformations est à la source de la pensée chinoise. Tr. Wilhelm (en, fr).
1. K'ien / Le Créateur | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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courant binôme échange trig. opposé tête en bas X maître gouvernant X '' constituant
Les traits pleins correspondent à la puissance originelle yang qui est lumineuse, forte, spirituelle, active. L'hexagramme est uniformément fort de nature. En tant qu'aucune faiblesse ne s'attache à lui, il a pour propriété la force. Son image est le ciel. La force est représentée comme n'étant pas liée à des conditions spatiales déterminées : elle est par suite conçue comme mouvement. Ce qui est tenu pour le fondement de ce mouvement est le temps. L'hexagramme inclut donc également la puissance du temps et la puissance de la persévérance dans le temps, la durée. Dans l'interprétation de l'hexagramme il faut toujours considérer un double sens : le sens macrocosmique et l'action dans le monde des hommes. Appliqué aux événements de l'univers, ce signe exprime la puissante action créatrice de la divinité. Envisagé par rapport au monde des hommes, il désigne l'action créatrice des saints sages, du souverain ou guide des hommes qui, par sa puissance, éveille et développe leur nature supérieure.
Suivant la signification première, les attributs (sublimité, possibilité de réussite, pouvoir de favoriser, persévérance) vont deux par deux. Pour celui qui obtient cette réponse de l'oracle, cela signifie qu'il recevra en partage un succès venant des profondeurs sous-jacentes aux événements de l'univers et que tout dépend du fait qu'il ne cherche son bonheur et celui des autres que par la persévérance dans la voie droite. Les significations spécifiques des quatre attributs sont devenues très tôt un objet de spéculation. Le mot chinois que nous traduisons par « sublime » signifie : « tête, origine, grand ». C'est pourquoi l'explication de Confucius déclare : « Grande en vérité est la puissance originelle du créateur; tous les êtres lui doivent leur commencement. Et cette puissance pénètre le ciel tout entier. » Ce premier attribut pénètre aussi les trois autres. Le commencement de toutes choses se trouve encore pour ainsi dire dans l'au-delà, sous forme d'idées qui doivent toutefois passer au stade de la réalisation. Mais dans le créateur se trouve aussi le pouvoir de prêter forme à ces archétypes des idées : cette notion s'exprime dans le mot « réussite ». Ce processus est représenté par une image de la nature : « Les nuages passent et la pluie opère, et tous les êtres individuels affluent dans leur forme » Appliqués au domaine de l'homme, ces attributs montrent au grand homme le chemin de la grande réussite : « Parce qu'il voit avec une grande clarté les causes premières et les effets, il accomplit en temps opportun les six degrés et s'élève sur eux vers le ciel en temps opportun, comme sur six dragons. » Les six degrés sont les six positions différentes à l'intérieur de l'hexagramme, qui sont représentées plus loin sous l'image de dragons. Ce qui est désigné ici comme le chemin de la réussite est la connaissance et la réalisation de la Voie (Tao) de l'univers qui, en tant que loi parcourant le commencement et la fin, produit tous les phénomènes conditionnés par le temps. De la sorte, chaque degré atteint est en même temps la préparation du suivant, et le temps n'est plus un obstacle, mais le moyen qui permet la réalisation du possible. L'acte de la création a trouvé à s'exprimer dans les termes de « sublime » et de « réussite ». L'œuvre de conservation est maintenant montrée comme une actualisation et une différenciation continuelles de la forme. Elle se traduit par les deux expressions « favorisant », littéralement. :« créant ce qui correspond à la nature » et « persévérant », littéralement. « juste et ferme ». « La marche du créateur modifie les êtres et leur donne forme, jusqu'à ce que chacun ait atteint sa juste nature, celle qui lui est destinée; il les conserve alors en conformité avec la grande harmonie. " Il se révèle ainsi comme favorisant par la persévérance. » Dans le domaine humain, on voit par là comment le grand homme confère au monde la paix et la sécurité par son action ordonnatrice : « Tandis qu'il s'élève, dominant de la tête, au-dessus de la foule des hommes, toutes les régions se réunissent dans la paix. » Une autre spéculation pousse plus loin la distinction des mots « sublime, réussite, favorisant, persévérant » et les place en parallèle avec les quatre vertus cardinales. A la « sublimité » qui, en tant que principe fondamental, inclut tous les autres attributs, est rattaché l'amour. A l'attribut de « réussite » sont rattachés les rites qui règlent et ordonnent les expressions de l'amour et, par suite, assurent leur réussite. Au terme « favorisant » est rattachée la justice qui crée des situations dans lesquelles chacun reçoit ce qui correspond à sa nature, ce qui lui est dû et qui fait son bonheur. A l'attribut de « persévérance » est rattachée la sagesse qui reconnaît les lois fixes de tous les événements et peut en conséquence créer des situations durables. Ces spéculations, qui apparaissent déjà dans l'un des commentaires formant la seconde partie du Yi King, le Wen Yen, ont constitué le pont qui a permis de réaliser l'union de la philosophie des cinq degrés de transformation (éléments), solidement établie dans le Livre des Annales, avec celle du Yi King qui, fondée seulement sur la dualité polaire des principes positif et négatif, a ouvert la porte à un symbolisme des nombres qui est allé se développant dans le cours du temps
Puisqu'il n'y a qu'un seul ciel, le redoublement du signe K'ien qui a le ciel pour image signifie le mouvement du ciel. Une révolution complète du ciel constitue un jour. Le redoublement du trigramme signifie que chaque jour est suivi d'un autre. Ainsi se trouve engendrée l'idée de temps. En outre, comme c'est le ciel lui-même qui se meut dans sa force infatigable, une autre idée apparaît, celle d'une durée puissante dans le temps et au-dessus de lui, et d'un mouvement qui ne cesse ni ne se ralentit jamais, de même qu'un jour succède inlassablement à un autre jour. Cette durée dans le temps est l'image de la force qui doit être attribuée en propre au créateur. Le sage emprunte à ce tableau le modèle de la manière dont il doit se développer en vue d'exercer une action durable. Il doit se rendre intégralement fort en écartant consciemment tous les éléments vulgaires ou dégradants. Il parvient ainsi à se rendre infatigable, qualité que l'on acquiert en limitant le champ de ses activités.
Le dragon possède en Chine une tout autre signification que dans la conception occidentale. Il symbolise la force électrique, motrice, excitante qui se manifeste dans l'orage. En hiver, cette force se retire dans la terre; elle rentre en action au début de l'été et apparaît dans le ciel sous forme d'éclair et de tonnerre. Ces phénomènes sont suivis de la pluie qui fait redescendre dans la terre les vertus célestes. Ici la force créatrice demeure cachée à l'intérieur de la terre et n'exerce encore aucune action. Appliqué aux situations humaines, cela signifie qu'un homme remarquable est encore inconnu. Cependant il demeure fidèle à lui-même. Il ne se laisse pas influencer par le succès ou l'échec extérieurs mais, fort et serein, il attend son heure. Il convient donc que celui qui, consultant l'oracle, trace ce trait, attende dans une patience paisible et forte. Les temps s'accompliront bientôt. Il n'y a pas à craindre qu'une volonté ferme ne s'impose pas. Il importe toutefois d'éviter de dépenser prématurément sa force et de vouloir obtenir par contrainte quelque chose dont ce n'est pas encore l'heure.
Les effets de la force lumineuse commencent ici à se manifester. Appliqué aux affaires humaines, cela veut dire que le grand homme apparaît dans le champ de son activité. Il n'occupe pas encore une place prédominante, mais demeure pour l'instant au milieu de ses pairs. Ce qui le distingue toutefois des autres est son sérieux, sa nature digne d'une confiance sans réserve, l'action qu'il exerce sur son entourage sans effort conscient. Un tel homme est destiné à acquérir une grande influence et à mettre le monde en ordre. C'est pourquoi il est avantageux de le voir.
Un champ d'activité s'ouvre pour l'homme remarquable. Sa réputation commence à se répandre. Les masses accourent vers lui. Sa force intérieure est au niveau de son action extérieure accrue. Des affaires s'offrent à lui à pleines mains et, le soir encore, alors que les autres se reposent, il est accablé par les plans et les soucis. Mais il existe un danger à la place du passage de la position inférieure à la position élevée. Plus d'un grand homme déjà s'est perdu parce que les masses accouraient vers lui et l'entraînaient dans leur sillage. L'ambition a détruit la pureté intérieure. Mais les tentations ne causent pas l'atteinte à la vraie grandeur. Si l'on demeure en contact avec les germes de l'époque nouvelle et ses exigences, on possède suffisamment de prudence pour éviter de s'égarer et l'on demeure sans reproche.
On parvient ici à la place du passage, où l'action libre peut se déployer. L'homme remarquable se trouve devant une double possibilité : ou bien prendre son essor et jouer un rôle déterminant dans la vie du monde, ou bien faire retraite et cultiver sa personnalité dans la quiétude : la voie du héros ou celle du saint caché. Il n'y a pas de règle générale pour décider de la voie juste. Celui qui se trouve dans une telle situation doit décider librement suivant la loi la plus intime de sa nature. S'il agit d'une manière entièrement sincère et conséquente, il trouve la voie qui lui convient, et cette voie est pour lui bonne et sans reproche.
Le grand homme est ici parvenu à la sphère des natures célestes. Son influence s'étend au loin de façon visible sur le monde entier. Quiconque le voit peut se proclamer bienheureux. Confucius dit à ce sujet : « Les choses qui sont consonantes vibrent ensemble. Les choses qui ont entre elles des affinités dans leur essence intime se recherchent mutuellement. L'eau coule vers ce qui est humide, le feu se tourne vers ce qui est sec. Les nuages (haleine de l'air) suivent le dragon, le vent (haleine de la terre) suit le tigre. Ainsi le sage s'élève et tous les êtres tournent les yeux vers lui. Ce qui naît du ciel se sent apparenté aux choses d'en haut. Ce qui naît de la terre se sent apparenté aux choses d'en bas. Chacun suit son espèce ».
Lorsqu'un homme veut s'élever si haut qu'il perd le contact avec les autres hommes, il devient isolé, et cela le conduit fatalement à l'échec. Il y a là une mise en garde contre une aspiration titanesque qui va au-delà de ses propres forces. La conséquence en serait une chute brutale et profonde.
Lorsque tous les traits sont des neuf, l'hexagramme tout entier se met en mouvement et se transforme dans le signe K'ouen, le réceptif, dont le caractère est la soumission pleine d'abandon. La force du créateur s'unit à la douceur du réceptif. La force est indiquée par le vol de dragons, et la douceur, par le fait que les têtes sont cachées. Cela veut dire : douceur dans l'action jointe à la force de la décision est source de fortune.
Yi King, le Livre des Mutations – Yi Jing I. 1. – Chinois off/on – Français/English
Alias Yijing, I Ching, Yi King, I Ging, Zhou yi, The Classic of Changes (Lynn), The Elemental Changes (Nylan), Le Livre des Changements (Javary), Das Buch der Wandlung.
Le Canon des Poèmes, Les Entretiens, La Grande Étude, Le Juste Milieu, Les Trois Caractères, Le Livre des Mutations, De la Voie et la Vertu, 300 poèmes Tang, L'Art de la guerre, Trente-six stratagèmes
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