Ce dispositif de 64 hexagrammes et de leurs commentaires et transformations est à la source de la pensée chinoise. Tr. Wilhelm (en, fr).
16. Yu / L'Enthousiasme | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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courant binôme échange trig. opposé tête en bas X maître gouvernant X '' constituant
Le trait fort à la quatrième place, celle du ministre qui gouverne, rencontre dans tous les autres traits, qui sont faibles, acquiescement et obéissance. Le trigramme supérieur Tchen a pour propriété le mouvement, et le trigramme inférieur, la terre, l'obéissance et le dévouement. On a ici le commencement d'un mouvement qui trouve en face de lui une attitude de dévouement et, par suite, entraîne tout avec lui et œuvre dans l'enthousiasme. Il est en outre une loi très importante : le mouvement doit s'exercer suivant la ligne de moindre résistance. Cette loi est exprimée dans l'hexagramme comme étant celle des phénomènes naturels et de la vie humaine.
Le temps de l'enthousiasme est amené par la présence d'un homme remarquable qui est en sympathie avec l'âme populaire et agit en accord avec elle. C'est pourquoi il rencontre une obéissance générale et librement consentie. Pour éveiller l'enthousiasme, il est donc nécessaire de conformer ses ordres à la nature de ceux que l'on gouverne. Le caractère infrangible des lois naturelles a pour fondement la règle du mouvement selon la ligne de moindre résistance. Ces lois ne sont pas extérieures aux choses, mais elles constituent l'harmonie immanente de leur mouvement. C'est pourquoi les corps célestes ne s'écartent pas de leur chemin et tout phénomène naturel s'accomplit avec une régularité précise. Il en va de même dans la société humaine. Là aussi les lois qui ont leurs racines dans le cœur du peuple sont exécutées, tandis que celles qui lui sont contraires ne suscitent que de l'aigreur. De plus, l'enthousiasme permet alors d'engager des auxiliaires pour l'exécution du travail, sans que des oppositions secrètes soient à redouter. L'enthousiasme est aussi ce qui permet d'uniformiser les mouvements des masses, notamment à la guerre, de manière qu'elles obtiennent la victoire.
Quand au début de l'été, le tonnerre, l'énergie électrique, sort de la terre en grondant, et que le premier orage rafraîchit la nature, une longue tension prend fin, la clarté et la joie s'instaurent. De même la musique a le pouvoir de dissiper dans les cœurs la tension, effet des sentiments sombres. L'enthousiasme du cœur s'exprime spontanément dans le chant, la danse, les mouvements rythmiques du corps. Depuis toujours, la vertu exaltante des sons invisibles qui émeuvent et unissent les cœurs des hommes a été ressentie comme une énigme. Les souverains mettaient à profit ce goût naturel pour la musique. Ils le rehaussaient et l'ordonnaient. La musique était regardée comme une chose grave et sainte, devant servir à purifier les sentiments des hommes. Elle était destinée à célébrer les vertus des héros et à lancer ainsi un pont en direction du monde invisible. Dans le temple, on s'approchait de la divinité en s'accompagnant de musique et de pantomimes (celles-ci ont ultérieurement donné naissance au théâtre). Les sentiments religieux envers le Créateur du monde étaient purifiés au moyen des sentiments humains les plus saints, la vénération à l'égard des ancêtres. Ceux-ci étaient invités à ces services divins en tant qu'hôtes du Seigneur du ciel et représentants de l'humanité dans ces régions supérieures. En unissant le passé humain et la divinité en de solennels moments d'émotion religieuse, on scellait le lien entre la divinité et l'humanité. Le souverain, qui honorait la divinité dans ses ancêtres, était par là le Fils du Ciel en qui le monde céleste et le monde terrestre entraient mystiquement en contact. Ces pensées constituent le résumé ultime et suprême de la civilisation chinoise. Confucius a lui-même déclaré au sujet du grand sacrifice au cours duquel ces rites étaient accomplis : « Celui qui aurait pleinement compris ce sacrifice pourrait gouverner le monde comme s'il le faisait tourner dans le creux de sa main »
Il s'agit d'un homme placé dans une situation inférieure. Il a de belles relations qui l'exaltent et dont il se glorifie. Cette arrogance lui attire fatalement l'infortune. L'enthousiasme ne doit jamais être un sentiment égoïste, mais il n'a sa justification que comme un état d'âme universel qui nous unit à autrui.
Ici est désigné quelqu'un qui ne se laisse égarer par aucune illusion. Tandis que d'autres sont aveuglés par l'enthousiasme, il reconnaît avec une parfaite clarté les premiers signes du temps. Il ne flatte pas ceux qui sont au-dessus de lui et ne néglige pas ses inférieurs. Ainsi il est ferme comme une pierre. Dès qu'apparaît le premier indice de désaccord, il sait battre en retraite au moment voulu, sans tarder même un seul jour. La persévérance dans une pareille façon d'agir apporte la fortune. Confucius dit à ce sujet : « Connaître les germes est assurément divin. L'homme noble ne flatte pas, dans son commerce avec les supérieurs, et il n'est pas arrogant dans son commerce avec les inférieurs. Assurément il connaît les germes. Les germes sont l'imperceptible premier début du mouvement, ce qui se manifeste en premier lieu comme porteur de fortune (et d'infortune). L'homme noble voit les germes et agit aussitôt. Il n'attend même pas un jour entier. Il est dit dans le Livre des Transformations : « Ferme comme une pierre. Pas un jour entier. La persévérance apporte la fortune. » « Ferme comme une pierre : pourquoi un jour entier ? On peut connaître le jugement. L'homme noble connaît le caché et le visible. Il connaît le faible, et le fort aussi : Voilà pourquoi les dix mille êtres tournent les yeux vers lui ».
On a ici l'inverse du trait précédent : là, autonomie, ici, regard enthousiaste vers les hauteurs. Si l'on hésite trop longtemps, cela aussi crée le remords. Il faut saisir le bon moment pour s'approcher. C'est seulement ainsi que l'on agit de façon juste.
L'oracle présente ici quelqu'un qui est capable de susciter l'enthousiasme par son assurance et sa liberté de pensée : parce qu'il ne doute pas et qu'il est entièrement sincère, il attire les hommes à lui. Parce qu'il leur donne confiance, il les gagne à une collaboration enthousiaste et il réussit. Comme une pince fait tenir les cheveux et les réunit, il unit les hommes en les faisant tenir ensemble.
L'enthousiasme est ici contrarié. On se trouve placé sous une pression constante qui ne permet pas de respirer librement. >Mais cette pression a son bon côté. On est ainsi préservé de consumer ses forces en enthousiasme creux. La pression constante peut ainsi bel et bien servir à conserver quelqu'un en vie.
Quand on se laisse aveugler par l'enthousiasme, cela est mauvais. Mais lorsqu'à son tour cet aveuglement est devenu une affaire dépassée et que l'on peut encore changer d'attitude, on est exempt de blâme. Se dégriser après un enthousiasme mal placé est chose tout à fait possible et très favorable.
Yi King, le Livre des Mutations – Yi Jing I. 16. – Chinois off/on – Français/English
Alias Yijing, I Ching, Yi King, I Ging, Zhou yi, The Classic of Changes (Lynn), The Elemental Changes (Nylan), Le Livre des Changements (Javary), Das Buch der Wandlung.
Le Canon des Poèmes, Les Entretiens, La Grande Étude, Le Juste Milieu, Les Trois Caractères, Le Livre des Mutations, De la Voie et la Vertu, 300 poèmes Tang, L'Art de la guerre, Trente-six stratagèmes
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