An anthology of 320 poems. Discover Chinese poetry in its golden age and some of the greatest Chinese poets. Tr. by Bynner (en).
Du Fu
A Song of a Painting to General Cao
O General, descended from Wei's Emperor Wu,
You are nobler now than when a noble....
Conquerors and their valour perish,
But masters of beauty live forever.
...With your brush-work learned from Lady Wei
And second only to Wang Xizhi's,
Faithful to your art, you know no age,
Letting wealth and fame drift by like clouds.
...In the years of Kaiyuan you were much with the Emperor,
Accompanied him often to the Court of the South Wind.
When the spirit left great statesmen, on walls of the Hall of Fame
The point of your brush preserved their living faces.
You crowned all the premiers with coronets of office;
You fitted all commanders with arrows at their girdles;
You made the founders of this dynasty, with every hair alive,
Seem to be just back from the fierceness of a battle.
...The late Emperor had a horse, known as Jade Flower,
Whom artists had copied in various poses.
They led him one day to the red marble stairs
With his eyes toward the palace in the deepening air.
Then, General, commanded to proceed with your work,
You centred all your being on a piece of silk.
And later, when your dragon-horse, born of the sky,
Had banished earthly horses for ten thousand generations,
There was one Jade Flower standing on the dais
And another by the steps, and they marvelled at each other....
The Emperor rewarded you with smiles and with gifts,
While officers and men of the stud hung about and stared.
...Han Gan, your follower, has likewise grown proficient
At representing horses in all their attitudes;
But picturing the flesh, he fails to draw the bone-
So that even the finest are deprived of their spirit.
You, beyond the mere skill, used your art divinely-
And expressed, not only horses, but the life of a good man....
Yet here you are, wandering in a world of disorder
And sketching from time to time some petty passerby
People note your case with the whites of their eyes.
There's nobody purer, there's nobody poorer.
...Read in the records, from earliest times,
How hard it is to be a great artist.
Bynner 61
Le général Tsao-pa compte l'empereur Vou-ti parmi ses ancêtres,
S'il est rentré dans la classe du peuple, il n'en est pas moins d'illustre maison1 ;
Et si les exploits de ses aïeux sont déjà d'un autre siècle,
La renommée qu'ils ont acquise ne saurait périr.
Il étudia d'abord l'art de tracer les caractères d'après les maîtres les plus célèbres,
Mais il se désolait de ne pouvoir surpasser le fameux Ouang-yeou 2.
Absorbé plus tard dans l'art de peindre, il ne sut pas même si la vieillesse approchait.
A ses yeux, les honneurs et les richesses ne furent jamais que des nuages passagers.
Durant la période kaï-youan3, le Fils du Ciel voulut souvent le voir,
Et les portes du palais s'ouvrirent plus d'une fois devant lui.
Les portraits des Serviteurs méritants4 conservaient à peine un reste de couleur ;
Le général, abaissant son pinceau, leur ouvrit un visage plein de vie.
De grands ministres se montrèrent de nouveau dans tout l'éclat de leur brillant costume ;
Des chefs terribles reparurent, la ceinture ornée de la grande flèche d'honneur5.
Quand le peintre eut retouché la barbe et les cheveux6 de ces guerriers illustres, il sembla qu'ils eussent retrouvé le mouvement ;
Ils avaient repris cet air martial que leur donnait jadis l'ivresse du combat.
L'empereur avait un cheval favori que l'on nommait Yu-hoa ;
Des artistes sans nombre accoururent pour le peindre : aucun d'entre eux ne sut le peindre ressemblant.
Alors Tsao-pa fut appelé au bas de l'estrade rouge7,
Et, dans le même moment, il y eut comme un ouragan qui s'avançait aussi.
C'était Yu-hoa qu'on amenait. Le général se plaça devant une toile blanche.
Il se recueillit profondément dans une attention silencieuse ; un grand travail s'opérait dans sa pensée ;
Puis, tout à coup, au milieu des neuf enceintes8, on vit surgir un véritable dragon9 ;
D'une seule fois, d'un seul jet, l'artiste avait fait évanouir dans le vide tous les chevaux vulgaires de ses innombrables prédécesseurs.
Deux êtres semblables se trouvaient dès lors en présence,
De telle sorte qu'on n'aurait su dire de quel côté se tenait le véritable Yu-hoa.
L'empereur, joyeux et souriant, pressait ses officiers d'apporter de l'or ;
Les écuyers et les intendants des écuries demeuraient confondus d'admiration.
Tsao-pa a fait un élève, il a formé le peintre Oey-kan,
Qui, lui aussi, excelle à peindre, dans le genre où son maître s'est illustré ;
Mais Oey-kan, qui rend la forme, est impuissant à transmettre la vie ;
Le souffle manque, le sang se fige, dans le corps de ses plus beaux chevaux.
Tsao-pa est un grand artiste ; Tsao-pa est donc un homme de génie.
Autrefois, les plus éminents personnages ont voulu tenir leur portrait de son merveilleux pinceau ;
Maintenant, on peut le voir errant au milieu des boucliers et des lances,
Retraçant parfois les traits du voyageur obscur qu'il a rencontré sur son chemin10.
Il tombe d'épuisement, au terme de sa longue carrière,
Et peut-être, dans le monde entier, n'est-il personne d'aussi pauvre que lui ;
Mais si l'on considère quel a été, depuis l'Antiquité, le sort de tous les hommes illustres,
On verra combien d'entre eux l'adversité et la misère n'ont cessé d'enlacer jusqu'à leur dernier jour.
1. Le général Tsao-pa était tombé en disgrâce, par suite d'intrigues politiques et de révolutions de palais dont il avait été victime, dit un commentateur chinois ; il s'était vu dépouillé de son grade et de ses distinctions.
Il existe en Chine dix-huit classes de gradés, dont l'ensemble comprend tous les degrés de la hiérarchie sociale, depuis le simple bachelier jusqu'aux ministres et aux vice-rois. Des privilèges nombreux leur sont accordés, et notamment l'exemption des peines corporelles. On fait partie de ces différentes classes à divers titres, soit qu'on appartienne à la corporation des lettrés et des fonctionnaires civils, soit qu'on occupe un grade dans l'armée, soit qu'on jouisse de quelque prérogative héréditaire. Rentrer dans la classe du peuple, c'est donc cesser de faire partie des classes privilégiées, à quelque titre que ce soit.
2. Calligraphe célèbre. — Voir plus haut n. 6, p. 212.
3. De 713 à 724 de notre ère, c'est-à-dire sous le règne de Hiouan-tsoung.
4. C'étaient les portraits des ministres et des généraux qui s'étaient le plus illustrés au service des empereurs chinois. Ils étaient, dit une glose, au nombre de vingt-quatre et formaient une galerie particulière, dans le palais impérial.
5. La grande flèche empennée, ou grande flèche d'honneur, se portait passée dans la ceinture. C'était une décoration que l'empereur Taï-tsoung avait instituée pour récompenser ceux qui s'étaient distingués dans l'art de la guerre et dans les combats. (Commentaire chinois.)
6. L'usage de se raser la tête et de ne conserver qu'une longue mèche de cheveux est un usage d'origine tartare, dont l'introduction à la Chine ne date que de l'avènement de la dynastie actuellement régnante, c'est-à-dire de la première moitié du XVIIe siècle. Ce fut le fondateur de cette dynastie qui, pour dissimuler le petit nombre de ses Tartares rendus trop reconnaissables par un signe distinctif si apparent, ordonna que, sous peine de mort, les vaincus devraient adopter eux-mêmes la coiffure des vainqueurs. Les Chinois opposèrent d'abord une vive résistance. Un grand nombre d'entre eux aimèrent mieux se laisser tuer que de se soumettre à cette bizarre coutume, qui finit néanmoins par s'établir après de sanglantes exécutions. A l'époque des Thang, les Chinois étaient fort soigneux de leur chevelure.
Aujourd'hui, le premier soin des rebelles, qui massacrent les Tartares en proclamant la déchéance de la dynastie mandchoue, est de couper leur queue et de laisser croître tous leurs cheveux.
7. Les degrés de l'estrade où siège l'empereur sont peints en rouge.
8. Expression qui sert à désigner le palais impérial, lequel a neuf enceintes.
9. Expression qui désigne un beau cheval.
10. « La guerre civile continuait de désoler l'Empire, dit un commentateur ; on ne voyait partout que des boucliers et des lances. Est-ce que des soldats barbares pouvaient apprécier un pareil talent ? »
Voir d'autres traductions françaises.
Hervey 40
300 Tang poems – Tang Shi III. 1. (61) – Chinese off/on – Français/English
Alias Tang Shi San Bai Shou, Three Hundred Poems of the Tang Dynasty, Poésie des Thang.
The Book of Odes, The Analects, Great Learning, Doctrine of the Mean, Three-characters book, The Book of Changes, The Way and its Power, 300 Tang Poems, The Art of War, Thirty-Six Strategies
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